'Bent' au Festival OFF Avignon 2011

Certains d'entres-vous ont peut être vu le film réalisé en 1996 par Sean Mathias. Mais saviez-vous que ce long métrage, qui a remporté le prix de la jeunesse au Festival de Cannes, est tiré d'une pièce créée à Broadway en 1979 ?

Richard Gere, (révélé un an auparavant au cinéma dans American Gigolo) y jouait le rôle de Max.

Ce spectacle reçut le Tony Ward de la meilleure pièce de l’année et remporta un succès mondial.

En France, c'est en 1981 que le public a pu découvrir "Bent". Dans les rôles principaux, on pouvait voir Bruno Cremer, Jean-Pierre Sentier, Didier Sauvegrain et Jean-Claude Dreyfus.

Actuellement, au festival d'Avignon vous pouvez avoir la chance de voir cette magnifique pièce interprétée par des comédiens brillants.

Pendant deux heures, qui passent sans que l'on rende compte, nous sommes témoins de plusieurs destins d’homosexuels, broyés par la folie meurtrière du nazisme.

Si avant sa déportation Max (Michel Mora) vit son amour des hommes dans le chaos. C’est avec Horst (Jean Matthieu Erny, jeune comédien excessivement talentueux), dans le camp de concentration de Dachau, dans un processus d’anéantissement général qu’il vit une histoire d’amour sublime et poignante.

Même si le temps passe sans que l'on s'en aperçoive, la violence physique ou des sentiments ne laisse pas indemne le spectateur.

Dans cette descente aux enfers où la dignité humaine n’existe plus, Jean Matthieu Erny et Michel Mora sont bouleversants.

Tout au long du spectacles, les scènes sont ponctuées passages musicaux interprétés à l'accordéon par Benoît Dagbert, qui se "métamorphose" durant l'intrigue, en finissant habillé comme un déporté. Les intermèdes musicaux permettent astucieusement de faire comprendre que l'action se déroule dans un lieu différent ou à une période ultérieure.

Cette version de "Bent "a été mise en scène par Anne Barthel d'abord au Théâtre du Nord Ouest à Paris, et jouée 50 représentations entre mars 2010 et juin 2011.

En Avignon, la scène est plus petite qu'au Théâtre du Nord Ouest, mais cela ne nuit pas au récit, et comme la salle est plus petite, on est très proche des comédiens, ce qui donne l'impression de partager leur triste destin. Quand on voit les larmes qui coulent des yeux de Jean-Matthieu Erny (ce qui serait plus difficile à voir dans une grande salle), on est encore plus touché par les évènements.

Le décor épuré contribue aussi à faire ressortir la violence des sentiments.

Vous l'aurez compris, nous vous conseillons vivement, ce petit bijou, qui doit être vu, en sachant au préalable que vous allez vivre un voyage en enfer avec quelques rayons de soleil à travers un amour impossible et interdit. Mais c'est aussi ça le théâtre : les vrais sentiments et une émotion "en directe".

A propos de cette version, Martin Sherman, l'auteur de la pièce a dit : "J’ai été très touché par la reprise de Bent à Paris, avec Michel Mora dans le rôle de Max. La pièce a été admirablement mise en scène par Anne Barthel et superbement jouée. »« Je suis extrêmement heureux qu’elle continue à se jouer pour une autre saison. » « Il est très étrange d’écrire une pièce dont on souhaite qu’elle cesse un jour d’avoir de l’importance, parce que les problèmes évoqués dans Bent pourraient ne plus exister. Mais il suffit d’observer les persécutions actuelles des homosexuels dans un certain nombre de pays d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie pour se rendre compte qu’il est encore immoral d’avoir des sentiments, des droits, de la visibilité ou d’avoir le droit d’aimer la personne de son choix. Même en Occident, où d’énormes avancées ont été réalisées, des préjudices et des mythes sévissent encore. J’espère qu’un jour viendra où on pourra dire en regardant la pièce Bent : « c’était comme ça avant, mais aujourd’hui c’est complètement différent. » Malheureusement, ce jour-là n’est pas encore arrivé."

Michel MORA : Max, Jean Matthieu ERNY : Horst, Valentin TERRER : Rudy, Gérard CHEYLUS : Freddie, George MATHIEU : Wolf, Philippe RENON : Greta, Franck DELAGE : Capitaine SS, Frédéric MOREL : Garde SS, Ludovic COQUIN : Victor